SFTR Securities Financing Transactions Regulation
Contexte
Depuis la crise de 2007, les régulateurs veulent plus de transparence et de visibilité sur les positions complexes et sur les liens entre un collatéral et la transaction sous-jacente. L’ESMA (European Securities and Markets Authority) initie SFTR (Securities Financing Transaction Regulation, qui comprend principalement les prêts emprunts de titres, et les pensions livrées) en 2015 à la suite des inquiétudes du G20 et du FSB concernant le « shadow banking », c’est-à-dire le financement autre que par des organismes de crédit. Le FSB (Financial Stability Board) identifie les opérations de cessions temporaires de titres comme une source de financement qui peut être trouvée en parallèle du système bancaire traditionnel et qui requiert une meilleure régulation. Les opérations de financement sur titres sont toutes les opérations où des titres sont utilisés pour emprunter du cash ou d’autres titres.
S’inspirant de précédents reporting réglementaires tels que EMIR (European Market Infrastrcture Regulation) ou MMSR (Money Market Statistical Reporting), l’ESMA veut prévenir les risques systémiques en collectant quotidiennement des données très précises sur chaque transaction SFT, le titre concerné, le collatéral de l’opération ainsi que le LEI (Legal Entity Identifier, standard mondial d’identifiant unique des entreprises. En France, les LEIs sont attribués par l’INSEE) des entités prenant part à la transaction.
Rappel sur les différents produits visés par la norme :
- Repo/reverse Repo: Contraction de « Sale and Repurchase Agreement ». Il désigne une transaction dans laquelle deux parties s’entendent simultanément sur deux transactions : une vente de titres au comptant suivie d’un rachat à terme à une date et un prix convenu d’avance.
- Buy/Sell back et Sell/Buy back : Opération d’achat/vente à terme. Identique à une opération de Repo, la différence provient du fait qu’elle n’oblige pas la rédaction d’un contrat. Chaque pate du contrat est donc une opération distincte
- Prêt/Emprunt de titres: Opération consistant à prêter/emprunter, des titres contre la promesse de restituer des titres de même nature à une date future, généralement dans quelques jours ou quelques semaines, et moyennant une commission payée par l’emprunteur au prêteur.
- Prêt avec appel de marge: Une opération par laquelle une contrepartie octroie un crédit en relation avec l’achat, la vente, le portage ou la négociation de titres, mais qui ne comporte pas d’autres prêts qui bénéficient d’une sûreté sous la forme de titres. Uniquement dans le cadre d’accord de Prime Brokerage
- Total Return Swap – TRS: Contrat d’échange sur rendement global. Produit dérivé qui transfère l’intégralité de la performance d’un actif détenu en échange d’une référence variable. Généralement le swap porte sur l’échange d’un flux de taux contre une exposition économique à une action, un panier d’actions ou un indice
En réglementant les TRS avec les Prêt/Emprunt et les Repos, l’exigence réglementaire va toucher plusieurs chaînes de traitement, les TRS étant généralement traités dans des chaînes d’Equity Swap (Div, Correl, Var …Swaps) bien distinctes des chaînes de Prêt/Emprunt.
Les exigences réglementaires de SFTR et impacts clés
Obligation de conservation et déclaration des opérations
Parmi les exigences SFTR, toute opération SFT conclue, modifiée ou terminée doit faire l’objet d’un rapport au plus tard à j+1 après la date de valeur de l’instruction. De plus, un devoir d’archivage incombe aux différents acteurs qui se doivent de conserver les données relatives au SFT pour une durée de 5 ans au moins après l’échéance de celle-ci.
A noter que la conservation des données est en place depuis le 12 Janvier 2016. Quant à la déclaration des opérations, elle sera mise en place à partir de 2018 de façon échelonnée selon le type de contrepartie :
- Octobre 2018 pour les entreprises d’investissement et de crédit
- Janvier 2019 pour les CCP (chambres de compensation) et les CSD (dépositaires centraux)
- Avril 2019 pour les OPCVM et les FIA
- Juillet 2019 pour les contreparties non financières
Obligation d’information et de transparence à l’égard des investisseurs
SFTR exige des organismes de gestion des OPCVM, des sociétés d’investissements OPCVM ainsi que des gestionnaires des FIA qu’ils informent les investisseurs de toutes les opérations qu’ils effectuent sur les SFT. L’exigence de transparence repose sur la communication aux clients :
- Depuis le 13 janvier 2017, des informations sur l’utilisation des SFT et total return swap dans le rapport annuel des FIA et dans les rapports semi-annuel et annuel des OPCVM
- Depuis le 13 juillet 2017 si l’établissement existait avant le 12 janvier 2016 : Les prospectus de l’OPCVM et les informations à communiquer aux investisseurs par les gestionnaires de FIA précisent quelles sont les opérations de financement sur titres et les contrats d’échange sur rendement global que les sociétés de gestion sont autorisées à utiliser, et indiquent clairement que ces opérations et instruments sont utilisés.
Obligation de transparence sur la réutilisation des titres reçus en garantie
La réutilisation d’un instrument financier remis en collatéral fait l’objet d’un accord conclu par écrit entre deux parties dont l’une, qui reçoit la garantie (le collatéral) sous la forme d’un instrument financier, et l’autre, qui fournit le collatéral (la contrepartie fournisseuse). Cette réutilisation est soumise à un ensemble de conditions préalables. La contrepartie fournisseuse de garanties est d’abord informée en amont des risques et des conséquences de défaut liées à la réutilisation par la partie qui les reçoit, et donne son accord par écrit. Lorsque les contreparties exercent leur droit de réutilisation, les instruments financiers reçus dans le cadre du contrat de garantie sont transférés du compte de la contrepartie qui les a fournis (en place depuis le 13 Juillet 2017)
Nous anticipons que ce dispositif, visant à sécuriser les actifs d’un prêteur et contraignant la circulation de papier, va donc impacter négativement la liquidité. Si les grosses émissions ou les grandes capitalisations n’en souffriront pas trop, pour les titres moins liquides, la contrainte pourrait être sensible.
Le reporting de transactions
Toute nouvelle opération de financement sur titre doit faire l’objet d’un rapport, les principales nouvelles exigences de reporting voulues par la STR sont :
- Double reporting (de la part des deux contreparties) à un Trade Repository suivant le standard XML (ISO 20022)
- Le reporting doit se faire au plus tard à j+1 après l’évènement de la SFT
- Les rapports doivent inclure l’UTI (Unique Transaction Identifier)
- Un reporting pour toute mise à jour du collatéral ou revalorisation de celui-ci
- Un reporting pour toute réutilisation d’un collatéral au niveau du LEI (Legal Entity Identifier) et de l’ISIN
Les données présentes dans les reporting sont regroupées en quatre catégories :
- « Counterparty data » : données relatives aux parties prenantes de l’opération (ex. contreparties, bénéficiaires, broker, chambre de compensation, entité responsable du reporting et entité soumettant). 18 champs au total
- « Loan and collateral data » : données relatives au prêt, au collatéral et à sa valorisation. 99 champs
- « Margin data » : données relatives aux appels de marge (initial and variation margin) versées ou obtenues dans le cadre de SFT compensés (nettés par lot de SFT compensé auprès de la CCP). 20 champs
- « Reuse data » : données relatives à la réutilisation des titres, au réinvestissement du cash ou à la source de financement des margin loans. Ces données ne pouvant être rapprochées à une transaction ni à une contrepartie prêteuse de collatéral, elles devront être reportées par le receveur (LEI) et par instrument (ISIN). Au moins 16 champs.
Ainsi on obtient 153 champs de données à reporter par opérations. Autant à réconcilier par les TRs.
Liste des Trade Repository enregistrés auprès de l’ESMA
Comme cité auparavant, tous les reports des SFTs doivent être envoyés à des Trade Repository dont voici la liste ainsi que la date depuis laquelle ils sont habilités chez l’ESMA :
Obligation de réconciliation
En mars 2014, la DTCC fait le constat que 60% des trades qui lui sont déclarés dans le cadre d’EMIR ne pouvaient être rapprochés de leur symétrique reporté par la contrepartie adverse, du fait d’incohérences et de manque d’harmonisation des standards de déclaration des champs.
Par ailleurs, les différences de fonctionnement et de format entre les trades repositories généraient aussi des impossibilités de réconcilier les trades entre eux au niveau de l’agrégateur central (BIS).
SFTR a donc pour objectif de cadrer davantage les modalités de reporting pour permettre au TRs et régulateurs de réconcilier les trades ; notamment via l’utilisation systématique d’identifiants uniques des contreparties (LEI) et des trades (UTI).
L’obligation de réconciliation des trades incombe donc aux TRs. L’utilisation d’un XML formaté (IS0 20022) doit permettre de limiter les matching fails
https://www.esma.europa.eu/